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Josh Alexander, récit du départ à la retraite forcé d’un catcheur indépendant

josh alexander

Dimanche dernier Josh Alexander, catcheur indépendant, a effectué ce qui restera son dernier match. Josh a une blessure à la nuque, assez grave pour mettre un terme un terme à sa carrière. Un cas qui n’est pas sans rappeler le sort de catcheurs plus connus, mais dans le catch indépendant les choses sont plus difficiles. Récit de ses derniers mois dans le milieu du catch qui ont connu leur lot de rebondissements.

Josh Alexander. Vous ne connaissez probablement pas ce nom. Ce Canadien de 28 ans a combattu pendant dix ans un peu partout sur le sol canadien et américain. Jusqu’au jour où le corps ne suit plus. L’histoire de Josh va vous paraître peu banale mais elle est pourtant symptomatique du statut du catcheur indépendant qui donne tout pour réaliser son rêve de gosse jusqu’à mettre sa carrière et sa vie en danger.

Il y a deux ans lors d’un match à l’AAW, promotion basée dans l’Illinois, Josh se blesse au cou. Il aura des douleurs dans la colonne vertébrale pendant six mois et perdra pendant quelque temps en puissance dans les bras mais grâce à du repos, il finit par aller mieux. Déterminé à prouver que ces huit années de travail et de sacrifices n’ont pas été vaines, il a pour objectif d’obtenir un contrat à la Ring of Honor.

Malgré le fait qu’il ait déjà effectué quelques matchs à la ROH que les dirigeants avaient apprécié, Josh doit passer un essai, une formalité qui l’agace quelque peu. Il faut indiquer que le prix d’un « try-out camp » à la ROH est de 300 dollars, une somme non-négligeable pour un catcheur indépendant. Cet investissement vaut néanmoins le coup puisqu’il obtient avec son coéquipier et meilleur ami Ethan Page un match de championnat télévisé pour les titres par équipe détenus par reDRagon (Bobby Fish et Kyle O’Reilly). « Ce match était presque parfait » raconte-t-il dans une interview à Slam Sports. « La foule de Dearborn avait fait de moi le mec le plus populaire de la soirée, à cause de mon protège-oreilles. Ethan Page et moi-même étions dans le coup, et avec l’aide de deux des meilleurs, nous avions frappé le home run. C’est l’un des moments de ma carrière dont je suis le plus fier. On a volé la vedette. »

La blessure qui refait surface, le début des problèmes

Or, ce que peu de gens savent à l’époque, c’est que sur un DDT de Fish sur Alexander, le Canadien sent un craquement. Peu de temps après, il perd toute sensation dans son bras droit. Même éloigné des rings, il peine à dormir tellement la douleur est forte. Il passe une IRM et fait appel à un neurologue. Verdict : il a une hernie discale et une opération chirurgicale est nécessaire pour la soigner. En septembre 2014, il se fait opérer. Pendant ce temps, il cache sa blessure à tout le monde et continue à combattre. Son coéquipier est au courant de la blessure à la nuque d’Alexander mais est loin de se douter de sa gravité. « Je savais qu’il m’aimait comme un frère et il ne m’aurait pas laissé catcher s’il avait connu le risque que cela impliquait. Je refusais de manquer mon opportunité avec la ROH« .

Deux semaines après son opération, Page et lui refusent un booking de la ROH. « Cependant, l’horloge tournait. Je devais revenir. Si la ROH ne voulait pas de moi, nous pouvions toujours réussir à intégrer la PWG. Je ne pouvais laisser tomber mon partenaire. Quand lorsque vous refusez un booking par équipe, ce sont les deux catcheurs qui en pâtissent. Même si on m’avait dit que je ne catcherais plus jamais, et si cela ne faisait que cinq semaines que je m’étais fait opérer (beaucoup trop tôt), j’étais de retour à l’Alpha-1 contre Ricochet. J’ai surmonté la douleur et l’aggravation, tout cela pour un objectif« .

La prise de trop

En février 2015, la Monster Mafia (ndlr: le nom d’équipe de Page et Alexander) arrive à la PWG et est opposée à la meilleure équipe au monde, les Young Bucks. Un rêve se réalise pour le gamin d’Hamilton dans l’Ontario, qui après avoir connu des shows à la qualité médiocre au Canada est parvenu à se produire en Californie devant le public le plus chaud du monde catch, son meilleur ami à ses côtés. Peu de temps après, ils affrontent Chris Sabin et Evan Bourne. Lors de ce match, sa vie prend un tournant décisif. Sur une combinaison powerbomb/les deux genoux en plein visage, il retombe sur la nuque.

Alexander précise: « Ce qui est arrivé n’est la faute de personne, c’est juste du mauvais timing. Cela aurait pu arriver à n’importe qui. C’est ça le catch; chaque prise ou mouvement est un risque. » Le lendemain matin, il se réveille avec une douleur extrême dans l’autre bras, le gauche, et aucune sensation. « Ouais, je suis idiot. Ce match et celui contre les reDRagon, le final ne devait même pas être sur moi. Tout cela aurait pu être évité. Est-ce le destin ? Non. Ce sont juste les risques que prennent les catcheurs. Si ce n’était pas arrivé sur ces prises, ce serait probablement arrivé sur quelque chose d’autre. Ma nuque est faible. Catcher pendant dix ans en donnant tout dans le ring, que ce soit devant dix ou mille personnes finit par vous rattraper.  »

Monster Mafia fait partie des équipes engagées dans le DDT, le réputé tournoi par équipe de la PWG. Ils y remportent les titres par équipe au premier tour pour les perdre en demi-finale. La semaine qui suit, Alexander passe une nouvelle IRM. « On peut dire que j’ai dû m’asseoir quand on m’a annoncé la nouvelle. » dit-il. « On m’a dit que j’avais soit un disque bombé soit une hernie discale à chaque niveau de ma nuque. La blessure était si importante que mon bras est maintenant complètement atrophié. L’opération était la seule option. Le 23 juillet, je vais subir ma deuxième opération du cou en moins d’un an. »

Avec clairvoyance et sans amertume, Josh fait le bilan des derniers mois: « Depuis un an, j’avais l’impression de ne pas mériter de monter dans un ring; je me sentais comme un imposteur de dire que je suis catcheur, malgré le fait que je n’ai jamais eu autant de succès dans ma carrière que cette année. L’année où j’ai eu les pires blessures. »

Joshua Lemay, de son vrai nom, conclut néanmoins sur une note positive: « Je regrette le fait de ne pas avoir décroché de contrat, de ne pas être parti sur mes propres termes. Je regrette même de ne pas avoir été invité sur le podcast de Colt Cabana (j’aurais dû être plus lèche-cul). Mais quand j’y pense, je suis fier de ce que j’ai accompli. J’ai combattu pendant dix ans, les couilles sur la table. Donner tout au catch et recevoir tant en retour; même si je n’ai pas signé de contrat. J’ai réussi à aller à la PWG, je me suis fait des amis extraordinaires et j’ai rencontré des fans incroyables. J’ai voyagé dans le monde entier, gagnant un peu d’argent au passage. J’apprécie chaque homme et chaque femme contre qui j’ai catché et avec qui j’ai partagé des vestiaires. Ai-je pris des risques inutiles ? Bien sûr. Est-ce que j’ai gagné en fierté ? Certainement. J’ai été coriace à un tel point ces dernières années que j’en ai été stupide. J’ai fait souffrir mon corps, réduit mon espérance de vie. J’ai tout risqué pour une chance d’être reconnu comme l’un des meilleurs. Je suppose que j’ai échoué de peu pour cet objectif. La durée de vie d’un catcheur n’est pas longue. Dans quelques mois, je ne serai qu’une arrière pensée pour les fans. Cela me va, cela signifie qu’ils prêtent attention à d’autres mecs qui essaient d’imprimer leur marque.« 

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