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Décryptage

La logique du « Tous sauf Reigns » a remporté le Royal Rumble

Randy Orton n’était ni favori ni outsider tellement il paraissait plus en retrait depuis quelques mois. Et pourtant.

WWE

Le Royal Rumble est l’évènement qui lance la Road to WrestleMania, c’est le moment où la WWE place toute son énergie pour offrir des affiches qu’elle pourra vendre dans sa plus grande vitrine disponible. Par conséquent, les yeux se tournent souvent autour du match phare de la soirée : le Royal Rumble Match. Cette idée de trente catcheurs pour un seul gagnant est déjà assez dense, mais quand celle-ci offre un ticket pour le main-event de WrestleMania, forcément ça crée les désirs les plus fous.

Reste qu’il y avait également d’autres points importants dans la soirée : l’attaque de Braun Strowman sur Roman Reigns, l’empêchant de devenir champion Universal mais surtout le seizième titre mondial de John Cena, égalant Ric Flair, ont été deux moments forts, offrant un bon match entre Kevin Owens et Roman Reigns et un match brillant entre AJ Styles et John Cena. On peut le dire, là où habituellement les matchs de championnat étaient assez quelconques les années précédentes au Royal Rumble, la WWE a su créer de l’attention autour de ces titres.

Le choix de donner ce seizième titre mondial à John Cena lors du Royal Rumble était un bon choix pour le match concernant le titre de la WWE, mais peut-être moins pour son successeur, le Royal Rumble Match. Ce dernier a été amplement critiqué pour des raisons diverses et qui sont à aborder, mais il faut démarrer par la base du relatif échec de ce dimanche : devoir prendre la suite d’un combat qui rentrera probablement dans les listes de fin d’année concernant les matchs de l’année, comme avait pu le faire la confrontation de SummerSlam, est toujours compliqué.

Un départ intéressant

Le discours à rallonge d’Enzo Amore et Big Cass n’y fera rien, on ne pouvait pas vraiment voir le big man du duo l’emporter ce soir. Malgré cela, l’idée de faire débuter le Rumble avec Enzo & Cass est une bonne idée pour l’ambiance de la salle. S’ils vous lassent peut-être derrière votre écrans, les SAWFT restent une valeur sûre pour faire chauffer une foule. L’entrée en second de Jericho est aussi intéressante, on se doute qu’il ne sera pas éliminé de sitôt et il permet de garder du star power dans le ring. Ce qui fait que les arrivées suivantes, bien que peu attirantes, ne font pas sombrer le public dans le désintérêt le plus total.

Surtout qu’en septième position, c’est Braun Strowman qui arrive. Un timing qui paraît rapide pour le colosse, surtout qu’il s’était régulièrement confronté à Goldberg et consorts lors des dernières semaines mais un timing qui permet aussi de se concentrer sur un favori lors de cette première moitié de Rumble. Strowman va faire très longtemps sa loi sur Zayn — arrivé juste après lui, ce qui est plutôt intelligent également — Ambrose et les autres catcheurs entrants successivement jusque la treizième position de Baron Corbin, qui va finir par éliminer — non sans l’aide de quelques participants — Braun Strowman.

Cette première partie, rythmée sans paraître trop rapide, aura également vue l’arrivée de Tye Dillinger à la dixième position, comme tout le monde le souhaitait. Accéder à cette requête du public a permis de le garder également dans le match, sans quoi on aurait pu se confronter au même problème qu’en 2015, lorsque l’élimination très rapide de Daniel Bryan avait provoqué un rejet total de la foule pour le match. On ajoute à cela cette élimination fantastique du gentleman Jack Gallagher — qui a sûrement gagné quelques fans ce dimanche — et vous obtenez une première partie de Rumble réussie.

Un Royal Rumble Match beaucoup trop chorégraphiée

Un chiffre : 6. C’est le nombre total d’éliminations entre la sortie de Braun Strowman du Royal Rumble jusqu’à l’arrivée de Brock Lesnar. On parle de six éliminations, mais c’est plutôt deux séquences. La première voit les New Day se faire éliminer par Cesaro & Sheamus puis, dans la confusion, Chris Jericho élimine le duo, qui se dispute sur leur attitude respective par rapport à leur partenaire. La deuxième concerne Apollo Crews, qui se fait jeter du ring par Luke Harper alors que la Wyatt Family était au bord de l’implosion, qui finira par arriver.

On se retrouve avec une seconde partie de Royal Rumble assez mal mise en place. La première impression qui est ressentie se trouve tout simplement dans l’attente d’éliminations vraiment marquantes. Kofi Kingston fait son spot acrobatique habituel mais en moins bien et pendant ce temps-là tout le monde se tape sans grand projet, comme s’il y avait une interdiction d’élimination jusqu’à l’arrivée de Brock Lesnar.

C’était peut-être le seul avantage de l’élimination de Daniel Bryan en 2015. Si elle a totalement mis le public en opposition à ce qui lui était proposé, elle a permis de garder un enjeu dans le milieu de tableau, où un favori du Royal Rumble tombe des mains d’un outsider ( qui était Bray Wyatt à l’époque). Sur le ring, au même moment, il y a de quoi faire. Une élimination de Sami Zayn aurait été mal vue mais ce n’est pas parce qu’elle est arrivée plus tard qu’elle a été mieux accueillie, The Miz, Rusev ou encore Bray Wyatt étaient aussi de bons candidats pour une élimination significative et marquante.

Au lieu de cela, il a fallu attendre un ballet très chorégraphié d’entrées. En 26ème, Brock Lesnar arrive et fait le ménage. On comprend l’envie de refaire de The Beast ce monstre qu’il était mais c’était sans compter l’arrivée de Goldberg en 28ème, qui va éliminer Brock Lesnar comme si de rien était. Un nouveau camouflet pour Brock Lesnar qui n’en restera pas là mais qui, pour ce soir, s’est de nouveau fait ridiculiser. On ne comprend pas vraiment le projet, surtout que quelques minutes plus tard, c’est un Undertaker arrivé en 29ème position qui élimine Goldberg. Voilà, c’était bien la peine d’axer tout votre Rumble Match autour de ces trois-là.

Roman Reigns, un #30 bien choisi

Et enfin, en dernier entrant, là où les rêves les plus fous des fans s’étaient concentrés : Roman Reigns. Si maintenant l’évocation de ce trentième homme prête à rire, sur le moment, on se dit que la WWE a un sacré culot. Et pour cause, le Big Dog va faire le ménage en éliminant The Undertaker, Chris Jericho et Bray Wyatt. Proche de l’évanouissement, le public échappe au drame une fois que Randy Orton fait passer Roman Reigns par dessus la troisième corde.

Prenons du recul et évaluons bien ce choix de Roman Reigns. Celui-ci est clairement conspué par la foule. 90% des publics ont tendance à le rejeter, et cela fait longtemps que l’ancien powerhouse du Shield n’est plus dans les grâces des spectateurs de la WWE. Prenons maintenant Randy Orton, si l’on vous dit il y a un mois : « Randy Orton va gagner le Royal Rumble 2017 », votre première réaction aurait probablement été un rejet de ce résultat. Randy Orton fait partie des meubles, il n’est pas vraiment un chouchou des internets mais reste populaire, sans que l’on est envie de le revoir main-eventer.

Maintenant, reformulons la phrase : « Randy Orton gagne le Royal Rumble 2017 en éliminant Roman Reigns », vous obtenez une réponse bien plus favorable. Cela reste un choix qui est loin d’être votre premier choix, mais bon, pourquoi pas, tant que ce n’est pas Roman Reigns. Cette logique du « tous sauf Reigns », la WWE l’a utilisée intelligemment pour créer une réaction positive à son résultat. Et c’est probablement ce qui sauve un Rumble Match qui il faut le dire, est au final assez mauvais.

Entre un match qui techniquement n’a pas offert beaucoup de spectacle sur le ring, dans les éliminations — le seul mouvement marquant du match étant l’élimination de Jack Gallagher — et un scénario qui s’est fait accaparé par les trois part-timers, il y a de quoi être déçu. La WWE n’a ni pris de risques ni tenté de surprendre, elle a capitalisé sur les gros noms déjà annoncés, ce qui a crée un effet inverse de celui voulu : on s’est concentrés sur les noms non-annoncés dans le Rumble, et la déception s’est faite alors assez grande.

En enlevant l’élément de surprise, le Royal Rumble Match a subi une dépréciation importante de ce qui fait tout son sel : ne pas savoir à l’avance qui va entrer. À partir de l’entrée de Brock Lesnar, vous aviez une chance sur deux de voir Goldberg ou The Undertaker entrer. Enlever l’Undertaker de la liste des participants annoncés, et vous obtenez des éléments de surprise mieux contrôlés. Il n’y avait aucun besoin d’annoncer l’entrée de The Undertaker. Goldberg et Lesnar sont deux noms suffisamment importants pour vendre des abonnements sur le Network.

Et bien qu’on ait toujours l’impression qu’ils viennent faire le minimum — Goldberg et Lesnar à eux deux sont restés moins longtemps dans le match que The Undertaker alors que ce dernier est clairement hors de forme — il n’y avait pas besoin d’annoncer vingt-deux noms avant même le début du Royal Rumble Match. Au final, Randy Orton fait un vainqueur solide de Royal Rumble, et si dans l’état actuel de la carte on se dirige vers un John Cena vs Randy Orton, la WWE sera peut-être prête à bousculer la carte pour créer un WrestleMania imprévisible qui jonglera comme on le sait déjà entre des affiches de part-timers et une succession de matchs à gros noms du roster. Ce WrestleMania ne sera probablement pas encore celui de la nouvelle génération qui pousse à la porte, mais celui de celle qui n’arrive pas encore à forcer la serrure.

La logique du « Tous sauf Reigns » a remporté le Royal Rumble
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