Il faudra surement faire un film en plusieurs épisodes, une vraie saga Heyman car clairement un livre sera insuffisant et même un DVD spécial récemment sorti est à coup sûr très incomplet et d’ailleurs, il ne l’a pas vraiment voulu car on est loin de la fin de l’histoire. Paul Heyman est un personnage multiple, à la carrière tellement riche que sous toutes les facettes qu’il a, il a fini par forcer l’entière admiration de tout le monde sans en rajouter mais uniquement en étant naturel. C’est encore une histoire assez fraîche car le cap des 25 années de carrière franchi l’année dernière ne le place pas encore comme ancien, et il a ainsi encore bien des chapitres à rajouter à son histoire avec le catch qui s’apparentera ainsi à l’histoire sans fin.
Dès l’adolescence, il est photographe au bord du ring du Madison Square Garden pour divers magazines dont le Pro Wrestling Illustrated. Il commence à faire son trou dans le management à vitesse éclair sous le nom de Paul E. Dangerously — nom qu’il tient de sa ressemblance avec Michael Keaton dans le film Johnny Dangerously, une identité qui va rapidement propulser le jeune homme de 22 ans sur le devant de la scène dans diverses fédérations indépendantes comme la FCW et l’AWA, mais le coup d’œil sur ses premières années formatrices serait facilement fastidieux donc autant passer directement six ans plus tard avec son arrivée à la WCW même s’il aura eu l’occasion de monter aussi sur le ring histoire de dire qu’il a vraiment endossé tous les rôles possibles dans le milieu du catch pro. Il s’illustrera en temps que manager en dirigeant la Dangerous Alliance, clan dominant mêlant anciens et figures émergentes, ainsi des Larry Zbyszko, Arn Anderson ou Rick Rude côtoient Steve Austin qui aura certainement beaucoup appris son côté showman en faisant partie du groupe.

Paul E. Dangerously et la Dangerous Alliance (Steve Austin, Larry Zbyszko, Arn Anderson, Rick Rude et Bobby Eaton) au micro de Jim Ross en novembre 1991.
Pour la petite histoire, un de ses premiers poulains à la WCW sera ensuite connu sous le nom de l’Undertaker, comme quoi dans une chaine de la réussite, Paul Heyman se situe toujours quelque part. Et dans cette première vraie grande fédération qu’il intègre, il évolue aussi comme commentateur qui cassera les oreilles de Jim Ross et développe facilement un gout pour la heel attitude qu’il maitrise parfaitement et c’est là où il excelle depuis toujours.
Ses mots sont forts, d’une grande franchise, et son habileté d’orateur n’aura jamais changé d’un iota même s’il a eu des périodes d’agitateur bien plus marquées à l’ECW. Et son histoire avec la WCW sera bien houleuse et s’achèvera avec fracas sur front de plainte pour antisémitisme.
Là où s’illustre la force et la légende particulière de Paul Heyman vient avec sa venue à l’ECW en 1993. Il n’est pas encore Paul Heyman mais recouvrera sa réelle identité lors de ce passage. Associé à Tod Gordon, il donne tout l’élan créatif et on ne voit pas ici le manager exclusif mais le vrai patron de fédération qu’il peut être, preuve en est le parcours de cette ECW devenue Extreme qu’il finira par gérer seul, en poussant bon nombre de talents à s’exprimer totalement et sans avoir de personnage lisse.

Même le style vestimentaire était extrême.
Il aura ainsi directement inspiré l’Attitude Era avec cette notion de l’imprévisible dans les actes et les discours. Ce catch fou et contre tous les codes du milieu illustre bien sa pensée d »électron libre restant maitre de ses choix. Booker, conseiller, acteur direct à la caméra, c’est une combinaison qui a charmé et il a mis sa folie furieuse en avant à cette occasion.
Le fait d’avoir endossé tant de charges plaira vraiment à Vince McMahon qui lui accordera une place importante dans la créativité à la WWE une fois que l’ECW devra s’arrêter en 2001. Mais il a créé ainsi un esprit EC Dub qui continue toujours à vivre à travers ceux qui y sont passés et lui-même avant tout qui en reste l’étendard humain à jamais. Mais sa franchise en toute occasion a pu aussi lui jouer des tours par la suite.
Il a managé Brock Lesnar dont il était déjà la voix en 2002 lors du premier run du costaud qui lui infligera un F-5 suite à une sacrée dispute avec Vince McMahon, illustration de rapports très houleux mais aussi très respectueux et complices entre les deux hommes tant en coulisses qu’à l’écran. Il a peu mis son corps en danger mais quand ça a été le cas ça n’a jamais été de main morte et on l’a encore vu avec CM Punk l’année dernière.

Paul Heyman et Brock Lesnar, champion de la WWE.
En un rien de temps à la WWE, il a battit sa légende en façonnant Brock Lesnar puis en étant manager du Big Show et de Kurt Angle, pour une série impressionnante de trois champions du monde de la WWE sous sa coupe. A chaque retour, il revient toujours plus fort et ainsi il fait de Smackdown un show émergent de grande valeur qu’il n’hésite pas à pousser tant dans l’écriture des storys que dans les actes télévisuels où il tient le rôle de General Manager avec un pic énorme entre 2003 et 2004. Mine de rien, avec tous ses rôles, il connait ainsi tous les petits secrets et est le premier confident de bon nombre de catcheurs qui voient en lui une figure paternaliste.
C’est comme cela qu’il fait venir CM Punk et contre vents et marées parvient à l’imposer face à Vince McMahon, un fait qu’il n’hésitera pas à rappeler lors de son retour et quand il cocoonera un CM Punk champion au plus long règne de l’histoire moderne de la WWE. Ses choix passent en fait quasi à l’unanimité, directement en consultation avec le boss.

Le boss, VKM tout puissant.
C’est ainsi qu’il fera renaître son ECW qui connaîtra un show glorieux en 2005, One Night Stand directement sorti de son booking, mais qui connaîtra aussi un lourd échec en décembre 2006 qui causera son départ et un hiatus. Tout du moins avec la WWE car avec Brock Lesnar il a noué une amitié qui fera qu’il participera également au succès de Lesnar à l’UFC qu’il connait aussi parfaitement. C’est vraiment un touche à tout et tout sport de combat tient avec lui un expert à sa disposition.
Son histoire récente à la WWE, démarre en 2012 et ne connait aucune interruption. Un retour qui l’a surpris lui-même, il avouera dans une interview en 2013 que quelques mois avant son retour il regardait encore WrestleMania sur un stream pirate. Un second run l’aura vu reprendre le fil du manager avec ses deux plus fiers poulains Brock Lesnar et CM Punk et c’est en fait là encore tout récemment qu’il connait dix ans plus tard une deuxième plénitude dans les succès à l’écran. Battre la streak de l’Undertaker à WrestleMania, c’était évidemment un fait dont il ne pouvait qu’être extrêmement proche. Et ce retour de Lesnar était la seule condition pour revoir Heyman dans un rôle vintage du manager pur et dur qu’il n’avait plus pratiqué depuis dix ans.

Paul Heyman et Brock Lesnar, WrestleMania XXX.
C’est rare tout de même d’aimer entendre un homme parler pendant des heures mais c’est bien ce qui arrive avec Paul Heyman qu’on ne peut pas se lasser d’entendre dire « My client Brock Lesnar conquered the Undertaker undefeated Streak at WrestleMania ». Des mots toujours très choisis et un discours très riche qui sont loin de faner son run présent. Entre ses mains, encore beaucoup de catcheurs sont passés avec plus ou moins de réussite mais surement du fait qu’Heyman n’a pas directement choisi de les driver.
Chez lui, un catcheur qui connait rapidement les grands succès est donc un vrai Paul Heyman Guy plongé dans son esprit hautement varié et créatif dès le début. Dans le cas contraire, ça ne marche pas et les exemples récents de Cesaro, Curtis Axel et Ryback en sont la preuve. Ainsi, Paul Heyman a vraiment lancé une catégorie de catcheurs à l’esprit bien trempé et très directs. Suivre les codes mais en les complexifiant volontiers est ce qui l’a fait avancer et ainsi, il aura directement impacté la mouvance du catch en participant pleinement à sa modernisation.
Bientôt des Paul Heyman Girls ? Rien n’est impossible avec lui qui n’a pas encore 50 ans donc encore tout le temps de sortir encore d’autres atouts de sa manche. Un visionnaire ? Surement, et tout en traînant derrière lui un joyeux baluchon du passé, il s’avance vers l’avenir avec l’envie de toujours nous surprendre et de toujours nous captiver.
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