Décryptage

Le retour des Cruiserweights, l’excitation et les questions

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Les Cruiserweight ont fait leur grand retour cette année, mais la formule va-t-elle perdurer ?

WWE

Tout a commencé par un tweet adressé à Triple H dans lequel il lui était demandé quel domaine du catch après les équipes et le catch féminin allait pouvoir profiter de l’exposition de NXT.

« Peut être les poids-moyens, il y a toujours quelque chose à regarder »

C’était donc à la fin de l’année 2015 que Triple H annonçait vouloir relancer la division des poids-moyens à la WWE. L’idée du Cruiserweight Classic est vite apparue et l’excitation était grande pour deux raisons : la renaissance d’une division qui a connu ses heures de gloire à la WCW et la possibilité de voir la WWE utiliser des catcheurs indépendants dans sa programmation.

La nostalgie de la division cruiserweight

Il s’agit en particulier de la division cruiserweight de la WCW, car la WWF/WWE n’a jusqu’à maintenant jamais su mettre en avant les catcheurs poids-moyens. La division en question a révélé certains des catcheurs les plus importants du début des années 2000 : Chris Jericho, Eddie Guerrero, Rey Mysterio Jr ou Dean Malenko.

À une époque où la voltige aux États-Unis consistait au top-rope elbow du macho Man ou Shawn Michaels et au frog splash de Snuka, l’apparition de matchs comme Eddie Guerrero contre Rey Mysterio Jr à Halloween Havoc 1997 fut une vraie révolution dans le domaine de la lutte. Rapides, aériens, techniques et dotés de vraies personnalités, la première partie de Nitro leur était en général réservée.

C’est cette période que le Cruiserweight Classic tient en modèle. Les cruiserweights sont des catcheurs à part, capables de tout faire. Qu’ils soient des techniciens capables de maitriser les soumissions ou le catch au sol, voltigeurs ou brawlers le but est de les mettre en valeur dans une division à part comme à l’époque de la WCW.

Un try-out à grande échelle

Avec seulement un catcheur sous contrat (Rich Swann) au moment de l’annonce du tournoi, il s’agissait en réalité de voir lesquels des participants pourraient rejoindre soit NXT, soit le roster principal de la WWE. Le moins qu’on puisse dire c’est que ce try-out géant fût un succès, car dix-huit des trente et un catcheurs non signés ont fini par parapher des contrats exclusifs avec la WWE. D’autres comme Kota Ibushi sont régulièrement invités mais refusent toujours d’y travailler à plein temps.

À ce titre il n’est pas exclu que d’autres évènements comme le Dusty Tag-Team Classic ou le tournoi féminin qui serait dans les tuyaux aient le même but final. Le fait qu’un show comme le Cruiserweight Classic soit sur le WWE Network permet aussi de voir comment ils se comportent dans le cadre d’un match fait pour la télévision. En effet, pour certains qui catchent depuis plusieurs années sur le circuit indépendant, il n’est pas nécessaire de regarder s’ils sont capables d’enchainer les roulades ou courir dans les cordes.

Le recrutement de Brian Kendrick et Drew Gulak est lui aussi intéressant car ce sont deux catcheurs qui sont aussi coaches à l’EVOLVE, Chikara et CZW pour Gulak. Leur présence sur la route sera certainement bénéfique pour les catcheurs moins expérimentés en plus d’alléger le travail des agents ou autres entraineurs.

Le tournoi en lui-même : une franche réussite

Même si certains catcheurs que la WWE observait n’ont pu participer au tournoi, Will Ospreay et Marty Scurll étaient tous les deux espérés par exemple. Le panneau des trente-deux catcheurs était impressionnant. Le star power était présent avec Kota Ibushi (NJPW & DDT), Zack Sabre Jr. (RPW, Progress & EVOLVE), Gran Metalik (NJPW & CMLL), Akira Tozawa (Dragon Gate) & Cedric Alexander (Ring of Honor). À noter aussi la participation du français Tristan Archer/Clément Petiot, éliminé au premier tour lors du premier épisode face à Cedric Alexander, mais dont le magnifique lariat figure encore régulièrement dans les highlights du tournoi.

Avec cinq matchs du tournoi figurant parmi les vingt meilleurs matchs de 2016 de la WWE, ces dix épisodes furent régulièrement la meilleure heure de programmes de la WWE chaque semaine. Les trois derniers matchs de Kota Ibushi face à Cedric Alexander, Brian Kendrick et TJ Perkins ont été à chaque fois excellents. Akira Tozawa face à Gran Metalik a aussi été un match à revoir absolument tout comme la finale entre ce dernier et TJ Perkins. Même s’il a quelque peu déçu dans le tournoi, le format de match plus courts n’aidant pas son style de catch, Zack Sabre Jr. était aussi un des points centraux du tournoi et s’il avait accepté l’offre de contrat le vainqueur du trophée aurait peut-être été différent. La même chose pourrait être dite sur son homologue japonais Kota Ibushi.

Une des réussite du tournoi était de présenter les cruiserweights comme des catcheurs complets, accomplis, différents, variés et pourvus de personnalités tout comme leurs homologues possédant cinquante kilos supplémentaires. Avec plusieurs techniciens comme Gulak & ZSJ, des luchadors comme Gran Metalik & Lince Dorado, des catcheurs traditionnels du puroresu comme Kota Ibushi & Akira Tozawa ainsi que des belles surprises comme TJ Perkins chaque semaine a délivré un spectacle différent, et à la manière d’un feuilleton qui s’écrit au fur et à mesure, chaque semaine l’intensité grimpait au rythme de la qualité des matches. Le tout bien aidé par une charte graphique différente de ce que la WWE nous montre en général — thème de couleur violet, caméra plus basse, rampe d’entrée différente… et l’excellent duo de commentateurs composé de Daniel Bryan et Mauro Ranallo.

205 Live : peut-on être optimiste ?

L’arrivée des cruiserweights à RAW dans la foulée du Cruiserweight Classic était attendue et annoncée mais fût une grosse déception. Aucune histoire intéressante, l’entièreté de la division présentée comme une classe de cours préparatoire au milieu d’un collège, aucune personnalité de ressortant du lot, et le champion n’étant même pas présent pour le lancement de la division. Des débuts balbutiants dans une indifférence quasi générale.

L’idée de voir les cruiserweights disposer de leur propre show est intéressante, mais le fait qu’il soit en direct, après SmackDown est problématique. Dans un premier temps, qui du public de base de la WWE voudra rester regarder Ariya Daivari contre Noam Dar après avoir vu AJ Styles contre John Cena à SmackDown ? Si on suit ce principe, quelle esthétique aura le show devant une salle au trois quart vide dans un silence de mort ?

Maintenant que les enregistrements de Superstar ont été annulés suite à l’arrêt de l’émission, peut-être serait il de meilleure utilité d’enregistrer 205 avant SmackDown afin de bénéficier d’une foule chaude, mais dans ce cas, que penserons les catcheurs de SmackDown s’ils voient huit catcheurs enchainer les hurricanrana et sommersault plancha trente minutes avant qu’un des shows principaux ne démarre ? N’oublions pas que les catcheurs de la WWE luttent en moyenne trois à quatre fois par semaine, et qu’enchainer les matchs spectaculaires maximisent les risques de blessures en plus de banaliser l’impact des manœuvres à hauts-risques.

Les cruiserweights risquent malheureusement de devenir victimes de leurs propres qualités. Leur côté spectaculaire doit être conservé mais altéré au risque d’accroitre le risque de blessure. Comme dit plus haut, il ne faut pas non plus que la foule soit fatiguée d’entrée par trois matchs dans le style indépendant au risque d’apparaitre morte d’ennui au point de non-retour quand Baron Corbin mettra Heath Slater dans un collier arrière pendant cinq minutes.

Ce style cruiserweight de nos jours est en fait le style des structures comme la Ring of Honor du milieu des années 2000 — lui-même inspiré par le style Junior Heavyweight de la NOAH du débuts des années 2000. Et qui en étaient les stars ? AJ Styles, Seth Rollins, Samoa Joe, Kevin Owens, Sami Zayn… Tous membres du roster principal de la WWE aujourd’hui. Si au niveau du spectacle, la division cruiserweight ne se différencie pas du roster principal, son utilité est remise en cause, et la seule différence entre les deux divisions est justement celle qui doit être cachée à tout prix : la différence de taille.

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