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Culture Catch

Le Champion Carnival, la parade de la All Japan Pro-Wrestling

Le Champion Carnival de l’AJPW fête sa quarantième édition cette année. Retour sur l’histoire de l’autre grand tournoi de catch japonais.

AJPW

Les tournois dans le catch japonais, c’est une affaire toujours remplie de prestige. Leur aura de fier guerrier gravitant autour d’eux, un tournoi est l’occasion pour un catcheur japonais de prouver sa suprématie dans des combats épiques, parfois au péril de leur vie. Certains sont maintenant reconnus comme des plus prestigieux et les remporter démontrent d’un véritable exploit qui vous fera respecter auprès des fans tout en brillant sur votre palmarès.

Avec l’avènement à l’international de New Japan Pro-Wrestling et de son G1 Climax, on en oublierai presque une autre compétition des plus prestigieuses avec qui la NJPW a longtemps rivalisé : le Champion Carnival de All Japan Pro-Wrestling, panthéon du puroresu qui fête sa quarantième édition cette année.

Sur les cendres du Père Fondateur

Bien avant la création des New Japan et All Japan Pro-Wrestling, toutes deux en 1972, une promotion régnait en maître sur le catch japonais : la Japan Wrestling Alliance, fondée en 1953 par Rikidozan, considéré comme le père fondateur du puroresu. Immigré coréen devenu sumotori, Rikidozan se vit refuser le stade ultime de yokozuna au vu de ses origines et décida donc de se tourner vers le catch. Il meurt en décembre 1963 à l’âge de 39 ans, assassiné des mains d’un yakuza.

Chaque année, Rikidozan organisait la World League, un tournoi où il pouvait affronter des noms du monde entier. Il y a notamment croisé le fer avec Lou Thesz, Killer Kowalski, Fred Blassie ou encore Larry Hennig. Fermée en 1973, les cendres de la JWA ont donné des idées à Antonio Inoki qui créera la NJPW et Giant Baba l’AJPW, dont la volonté était de rendre hommage à leur maître.

Ainsi naquit le Champion Carnival, dès la première d’année d’existence de la All Japan. Tel son désormais rival Inoki, les premières éditions du tournoi sont remportée par Giant Baba. On pourrait critiquer le fait que le promoteur se met lui-même dans une bonne position mais il faut imaginer qu’à l’époque après la mort de Rikidozan, seuls Inoki et Baba étaient choyés par les foules. Baba remportera sept des dix premières éditions du Carnival, laissant deux victoire à Abdullah The Butcher en 1976 et 1979 ainsi qu’une à Jumbo Tsuruta en 1980.

Giant Baba cessera ensuite d’organiser le Champion Carnival en 1983 : le G1 Climax, alors nommé IWGP League à l’époque, était bien plus populaire que le tournoi de la All Japan. Baba souhaitant donc ne pas se faire ridiculiser tout en faisant quelques économies a préféré mettre son tournoi au placard pendant une bonne dizaine d’années.

Dans la légende

Vers la fin des années 1980, la New Japan Pro-Wrestling est en perte vitesse, la All Japan a un immense boulevard pour revenir sur le devant de la scène tout en ayant quelques pépites prêtes à exploser à tout moment : Mitsuharu Misawa, Kenta Kobashi, Toshiaki Kawada, Akira Taue, pour ne citer que ces quatre illustres. Une occasion de leur donner une chance face à la génération vieillissante mais toujours valeur sûre en les envoyant croiser le fer avec des noms tels que Jumbo Tsuruta ou Stan Hansen, vainqueur des trois premières éditions du revival du Champion Carnival en 1991, 1992 et 1993.

Vient ensuite le tour des Four Pillars of Heaven Misawa, Kobashi, Kawada et Taue de la tête et des épaules la All Japan durant la décennie à venir avec les classiques qu’on connaît et qu’on doit absolument voir dans sa vie. Dans des matchs complètements dingues où chacun des quatre parviendra à remporter le prestigieux tournoi, même si Kobashi le gagne un peu plus tard en 2000, année où la promotion voit le départ de la presque intégralité de son roster pour fonder la Pro Wrestling NOAH avec Mitsuharu Misawa.

Tantôt un tournoi en plusieurs blocks ou en un unique, le Champion Carnival était le tournoi à suivre il y a vingt-cinq ans. Une compétition où les blessures étaient légions. Les égalités aussi d’ailleurs : l’édition de 1997 verra une égalité entre Kawada, Kobashi et Misawa où les deux derniers cités n’arriveront pas toujours pas à se départager tandis que Dangerous K triomphe de ses deux rivaux pour s’adjuger son second et dernier Carnival après celui de 1994.

Les gaijins brillent sans forcément y gagner quelque chose. Steve Williams, Johnny Ace, Dan Kroffat, Doug Furnas ou encore Gaby Albright sont des réguliers de la All Japan dont la popularité est plus grande au Japon que dans leur pays d’origine. Le plus flagrant exemple restera celui de Stan Hansen : grandement respecté et considéré comme l’un des meilleurs catcheurs étrangers que le puroresu ait connu tandis que sa popularité aux Etats-Unis en est bien moindre : son intronisation au WWE Hall of Fame 2016 en est une preuve.

Les copains d’abord

En août 2000 survient un événement dont la All Japan Pro-Wrestling ne s’est réellement pas encore remis aujourd’hui : en froid et en proie à de violentes disputes avec Motoko Baba, veuve de Giant Baba décédé un an et demi plus tôt, Mitsuharu Misawa décide de quitter la promotion et d’accomplir de l’un de plus grands rêves : fonder sa propre promotion de catch. La Pro-Wrestling NOAH naît et emmène avec elle vingt-six des vingt-huit nippons signés à la All Japan, seuls Toshiaki Kawada et Masanobu Fuchi restent loyaux à la promotion de feu Baba, tout comme les américains Stan Hansen et Steve Williams.

Au bord du gouffre et perdant dans le même temps leur entente avec la chaîne Nippon TV, All Japan voit une main se tendre à elle : celle de sa vieille rivale de la New Japan Pro-Wrestling. Dès 2000, Motoko Baba surprend en autorisant Genechiro Tenryu à revenir sur les rings de la promotion et remporter le Champion Carnival 2001, alors que son mari avait déclaré que ce dernier n’allait jamais remettre un seul pied sur son ring suite à une trahison de sa part. Remettons les choses dans le contexte : en 1990, Tenryu était au sommet de la All Japan et a soudain décidé de démissionner pour créer sa promotion, la Super World of Sports, ce qui n’a clairement pas plu à Giant Baba, mentor du catcheur. La SWS sera un bel échec, fermant seulement deux ans plus tard. Tenryu créera par la suite la WAR qui fermera ses portes en 2000.

Keiji Mutoh surprend lui aussi à son tour en rejoignant les rangs de la All Japan en y devenant surtout le président, emmenant par ailleurs Satoshi Kojima et Kendo Kashin avec lui. Une décennie assez creuse où Mutoh se met dans une position confortable en remportant à trois occasions le Champion Carnival ou en faisant gagner les copains comme Kojima, Kensuke Sasaki ou encore Taiyo Kea. En 2008, c’est le poulain de la promotion Suwama qui s’adjuge le tournoi en battant Hiroshi Tanahashi, alors en froid avec New Japan qui s’est payé une petite tournée chez le rival.

Le Roi en personne Minoru Suzuki, en freelance, laisse son empreinte en remportant consécutivement les éditions de 2009 et 2010, le Roi en personne on vous dit.

All Japan envers et contre tous

Minoru Suzuki a ouvert une brèche : celle où la All Japan commence à inviter d’autres noms d’un peu partout sur le circuit japonais, en témoigne la victoire de Yuji Nagata en 2011, sous contrat avec la New Japan qui à 42 ans à l’époque bottait encore de sacrées paire de fesses — c’est par ailleurs toujours le cas neuf ans plus tard. En 2013, Jun Akiyama s’offre le tournoi alors devenu le président après Keiji Muto, le phénomène du promoteur qui se met dans une position confortable touche malheureusement tous les circuits. Akiyama offre ensuite le tournoi au copain Takao Omori, un autre phénomène qui touche lui aussi à l’international. Les copains d’abord comme disait George Brassens.

Akebono, sumotori — le même qui a battu The Big Show à WrestleMania 21 —créé la surprise en rivant les épaules de Suwama, un événement assez mal reçue par les foules, le catch n’étant pas dans les veine du pratiquant de sumo.

Dès 2016, la All Japan invite de nombreux catcheurs indépendants dont Daisuke Sekimoto, pilier de la Big Japan Pro Wrestling, qui s’est payé cette même année des noms tels que Kento Miyahara, Jun Akiyama ainsi que Zeus en finale. Naomichi Marafuji, quant à lui, se paiera l’édition 2018 où il a quasiment roulé sur tout ce qu’il se passe en perdant seulement deux matchs face à Suwama et Zeus et se paiera même le luxe de battre le champion Triple Crown de l’époque Kento Miyahara. Ce dernier remporte l’édition 2019 tout en étant champion majeur, le patron.

Au travers de quarante-huit ans d’histoire, le Champion Carnival fort de sa quarantième édition cette année se définit vraiment comme un tournoi aussi prestigieux qu’un G1 Climax. Certes, ce dernier est désormais bien plus médiatisé, néanmoins, le Carnival reste une attraction phrase du puroresu, regorgeant toujours autant de prestige malgré tout.

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