kenny omega
Portrait

Kenny Omega, le modèle du catcheur des années 2010

Auteur d’une année 2016 incroyable, le nom de Kenny Omega est sur toutes les lèvres en ce début de 2017.

NJPW

En devenant le premier Gaijin à remporter le G1 Climax de la NJPW et en faisant le main-event au Tokyo Dome, Kenny Omega se voit propulsé au top du catch mondial. Celui ayant débuté comme Junior pour devenir un top Heavyweight de la deuxième compagnie de catch au monde est en train de re-définir (avec d’autres catcheurs) le moule du catcheur moderne. Il est à ce titre intéressant de se pencher sur son parcours, sa personnalité et aussi un peu spéculer sur son avenir car à 33 ans, le leader du Bullet Club a encore plusieurs années devant lui pour aller encore plus haut sur l’échelle mondiale du catch.

Le Japon comme but et le puroresu comme influence

Fan de Mr Perfect et de Hockey étant enfant, Kenny Omega s’est assez vite tourné vers le catch dès son adolescence. Après quatre années au sein de la fédération canadienne PCW il décroche un contrat de développement via John Laurinatis pour la WWE et est envoyé dans la Deep South Wrestling sous la direction de Bill DeMott. Déjà à cette époque il désire rejoindre le Japon, et c’est par l’intermédiaire d’un stage d’Harley Race pour la NOAH que la WWE le repère. Il a cotoyé certains catcheurs actuels de la WWE comme par exemple The Miz, Zach Ryder, Curt Hawkins ou Jack Swagger. Il a gardé une très mauvaise expérience de son passage à la DSW mais considère que ça lui a appris certaines choses et l’a rendu plus fort. Au bout d’un an, il demande la résiliation de son contrat, et reçoit une promesse (non tenue) de John Laurinatis de pouvoir rentrer à la All-Japan. Le but de Kenny Omega à ce stade de sa carrière était déjà de lutter au Japon, et il était d’autant plus frustré d’entendre Bill DeMott refuser de voir ses catcheurs s’essayer au Strong-Style sous sa gouvernance.

Après s’être essayé au MMA avec un certain succès — remportant des tournoi de Jiu-Jitsu avec très peu d’expérience, il retourne au catch en 2006 avec des passages à la Pro-Wrestling Syndicate et la Jersey All-Pro Wrestling. En 2008 il découvre la Dramatic Dream Team et son fer de lance Kota Ibushi. C’est là une nouvelle carrière qui débute.

Des expériences mitigées sur le circuit indépendant aux États-Unis

Mais naturellement, Kenny Omega a aussi fait ses armes sur son continent natal. Après son départ de la Deep South Wrestling, plusieurs fédérations se faisaient une joie de pouvoir bénéficier d’un tel espoir. En plus des fédérations canadiennes, certaines promotions en vue aux Etats-Unis étaient bien décidées à pouvoir mettre en valeur un prodige comme Omega.

Il démarre régulièrement à la Ring Of Honor en 2008 mais peine à trouver le succés, commençant par quatre défaites de rang. Plusieurs victoires dont certaines face à Austin Aries lui ont valu un regain d’intérêt et même la faveur d’un show portant son nom (The Omega Effect en 2009 ou il affronte Austin Aries pour le titre de champion de la Ring of Honor). Deux ans plus tard il disparait du booking de Delirious. Il n’apparaitra plus pour la fédération pendant presque 6 ans.

La Pro-Wrestling Guerrilla par contre décide de le lancer telle une fusée, lui faisant gagner le Battle of Los Angeles 2009 et lui adjugeant à l’occasion le titre de champion du monde de la PWG. Il battra dans l’année des catcheurs comme Kevin Steen ou Roderick Strong et sera plus ou moins régulier pendant plusieurs années dans la fédération Californienne. Malgré tout, son parcours sur le circuit indépendant américain a un goût d’inachevé, faute peut-être à une plus grande volonté d’apparaître sur le circuit Japonais.

Kenny au Japon : Comment un Gaijin a conquis la scène du catch nippon

Après la découverte de la fédération barrée DDT, Kenny décide de challenger Kota Ibushi via une vidéo ou il se filme dans un match dans un pur style DDT. Certain que la liberté créative offerte au Japon lui permettra de briller plus que dans l’univers hyper-scripté de la WWE, il se proclame Champion Anywhere.

C’est une amitié extraordinaire qui va lier les 2 catcheurs jusqu’à aujourd’hui. Partenaire dans l’équipe Golden Lovers, ils deviennent champions par équipe mais s’affrontent aussi pour des titres solo avec en particulier un excellent match au Budokan en 2012. Au cours de sa carrière pour cette fédération il affronte aussi des adversaires comme El Generico, Prince Devitt ou Noamichi Marufuji. Ce sont 2 autres vidéo virales qui vont le faire connaitre. Dans un premier temps il affronte une fillette de 9 ans du nom de Haruka. Puis il affronte en équipe avec Kota Ibushi, Danshuke Dino & Yoshihiko, la poupée gonflable.

S’en suivent des passages à la All-Japan pour les tournois Junior (qu’il remporte) et aussi à la NJPW. En 2012 il lutte pour cinq fédérations différentes au Japon : la DDT, la All-Japan, la New Japan Pro Wrestling, la Dragon Gate et la Ice Ribbon!

L’éclosion à la New-Japan

Il rejoint dans un premier temps sporadiquement la fédération nippone à partir de 2010 en compagnie de son partenaire Kota Ibushi.  Il participe ensuite aux Best of Super Juniors sans toutefois parvenir ne serait-ce qu’en finale. Il gagne tout de même le titre par équipe Junior dans l’équipe des Golden Lovers face à Apollo 55 (Prince Devitt & Ryusuke Taguchi) mais ça sera un règne très court.

À la fin de son contrat avec la DDT, Kenny Omega tiendra une conférence de presse annonçant sa signature pour la NJPW, refusant d’avouer qu’il rejoint le Bullet Club, ce qu’il fera tout de même dans la foulée, rejoignant le côté des heels pour la première fois dans la fédération de Bushiroad. Étant estampillé le Junior du clan sous la gouvernance d’AJ Styles, il détiendra la titre Junior de la NJPW durant presque l’entièreté de son parcours dans cette division. À Wrestle Kingdom 10, il perd ce titre sans que ses épaules ne soient au tapis pour le compte de trois, et passera dans la division heavyweight à la faveur d’un One Winged Angel sur le champion Intercontinental Shinsuke Nakamura et éjectant AJ Styles du Bullet Club par la même occasion, prenant les rennes du Clan noir.

L’année 2016 sera exceptionnelle pour Omega qui devient champion Intercontinental face à Hiroshi Tanahashi après que Shinsuke Nakamura ait rendu le titre vacant, introduira le premier Ladder Match à la New Japan et devenant le premier Gaijin (catcheur non Asiatique) à gagner le G1 Climax face à Hirooki Goto en finale. Son combat perdu face à Kazuchika Okada sera perçu par Dave Meltzer comme le meilleur combat qu’il n’ait jamais vu, lui décernant la note jamais attribuée de 6 étoiles. Après ce match Kenny Omega laisse planer le doute sur son avenir.

Peu de choses sont connues sur sa situation contractuelle. La rumeur veut qu’il ait encore une année restante sur son contrat actuelle à la New Japan pro Wrestling, mais d’autres sources indiquent que son contrat se terminerait le 31 Janvier 2017. La WWE serait bien entendue intéressée par le canadien qui est en ce moment un des catcheurs les plus populaires du monde, mais on est en droit de s’interroger par exemple sur son faible nombre de match sur le sol américain (seuls 10 sur les deux dernières années et deux en 2016). Aurait-il un problème de visa similaire à Mike Bailey, laissant planer le doute d’une longue suspension sur le sol des Etats-Unis? Canadien résidant au Japon, ce genre de droit n’est pas si simple à obtenir pour Kenny Omega.

La WWE pourrait être une structure assez puissante pour faciliter la procédure. Mais tout laisse tout de même penser que Kenny Omega prolongera son bail à la NJPW, là ou la fédération lui fait confiance et lui laisser une certaine liberté créative en haut de la carte. Kenny Omega contre Kazuchika Okaka : le match revanche est l’affiche la plus chaude du moment. On voit quelque part en Kenny Omega l’étendard du catch non-WWE et c’est certainement sa valeur marchande la plus importante : si la WWE le veut elle devra y mettre le prix, au même titre que les fédérations indépendantes qui peuvent marketer sur leur carte « le catcheur que même la WWE ne peut pas avoir est ici ».

Un talent à part

Comme la nouvelle vague de catcheurs apparu vers la fin de la décennie 2000, Kenny Omega est le parfait hybride entre le style Junior Heavyweight Japonais et le Strong Style Heavyweight américain. AJ Styles, Prince Devit, Seth Rollins ou même avant eux Jerry Lynn et Rob Van Dam, étaient des catcheurs agiles comme des poids-moyens, mais capables de prises typiques de poids-louds comme des powerbombs ou des slams qui requièrent une certaine puissance. Kenny Omega possède tous ces atouts, et même la définition musculaire parfaite sans qu’elle ne gène son agilité.

Influencé par les arts martiaux — son film préféré étant Bloodpsort avec Jean-Claude Van Damme —, il est passé par beaucoup de phases dans son style de catch, tantôt comédie, tantôt basé sur les jeux vidéos comme Street Fighter — beaucoup de ses prises sont basées sur Megaman, Final Fantasy ou encore Street Fighter —, sa période actuelle plus sérieuse (par moment) est inspirée du personnage du Terminator joué par Arnold Schwarzenegger. Même sa prise de finition, le One Winged Angel est un superbe mélange, de force, de rapidité, d’équilibre et d’agilité.

Un match en particulier est un parfait exemple de ce personnage de jeu vidéo prenant forme humaine, son match face à Hirooki Goto en finale du G1 Climax 2016. Alors qu’il ne parvenait à venir à bout de son adversaire, il a, à la manière de Megaman, comme « absorbé » les prises de finition des anciens leaders du Bullet Club et de son ancien équipier Kota Ibushi en délivrant le Sunday Bloody Sunday, le Boma-Ye, le Styles Clash, la Liger Bomb et le Phoenix Splash. Ce genre de détail montre à quel point le personnage de Kenny Omega est travaillé dans les moindres recoins, et que sa vision du catch va bien plus loin qu’un enchaînement de moves impressionnant. C’est une nouvelle étape de la psychologie dans le ring.

Kenny Omega est un catcheur qui sait exactement séparer sa personnalité selon qu’il soit du côté des faces ou de celui des heels. Sur tout son run en tant que face à la DDT, il a effectué ses promos en Japonais. parfaitement bilingue, il vit dans un des districts de Tokyo, ce qui explique son immense popularité dans cette ville et particulièrement dans l’arène de Korakuen. Depuis qu’il a rejoint le Bullet Club, il refuse de s’exprimer dans cette langue et ne s’exprime qu’en anglais, allant même jusqu’à citer les paroles de « Teenage Dream » de Katy Perry comme par exemple après avoir remporté le titre Intercontinental.

Lorsqu’il a pris le personnage du « Cleaner », Omega souhaitait s’inspirer des membres de la mafia nettoyant les scènes de crimes, mais alors que le public japonais pensait qu’il incarnait un concierge, il décida de se moquer d’eux en venant vers le ring avec un balai et des poubelles. Qu’il soit heel ou face, Kenny Omega ne fait jamais les choses à moitié. A ce titre, son accoutrement en dit long sur sa manière d’aborder le match. S’il porte un pantalon sombre aux couleurs du Bullet Club, nous avons affaire au Kenny sérieux, alors que s’il porte un pantalon bariolé à franges, alors ça sera l’Omega comédie qui va jouer avec son adversaire comme les Young Bucks.

Au même titre que Kazuchika Okada, Omega ne délivre jamais une mauvaise performance lorsqu’il est placé en main-event. Cette qualité est certainement la plus importante dans le catch actuel car ça démontre une intelligence certaine et une volonté de prolonger sa carrière. Que ce soit à la NJPW ou si d’aventure son chemin devait continuer aux Etats-Unis à la WWE, sa capacité à livrer d’excellents matchs en tête de pay per view, et avoir la longévité nécessaire pour rapporter de l’argent un long moment pour la compagnie sont les deux attributs les plus important de l’industrie.

Partir vers la WWE ou rester au Japon?

Les arguments sont nombreux des deux côtés. S’il souhaite rester du côté de la NJPW, une place de main-event lui est déjà réservée. Avec les projets d’expansion de la New Japan aux Etats-Unis, faire de Kenny Omega la figure de proue du navire nippon serait une solution parfaite pour mettre en avant la deuxième fédération mondiale.

Parfait bilingue, un vrai run en babyface l’attend à la New Japan, en particulier un couronnement dans une arène de Tokyo ou il est à chaque fois très bien reçu. On imagine que la NJPW fera tout pour ne pas perdre le leader du Bullet Club trois fois d’affilée. Pour terminer, l’alliance avec les Young Bucks semble si bien marcher qu’on aurait envie de voir ce que le trio pourrait faire les prochaines années avec la liberté créative offerte par Gedo.

Mais de nombreux arguments montrent que c’est le moment ou jamais pour rejoindre la WWE. À 33 ans, il a l’âge parfait pour être au premier plan pendant un certain nombre d’années. De surcroit, jouira-t-il un jour de plus de notoriété qu’en ce moment même? Il sera plus over et meilleur au micro que Roman Reigns alors qu’ils sont dans la même tranche d’âge. Plus grand et plus jeune qu’AJ Styles, en plus d’avoir un histoire commune et inachevée avec lui, il y a encore une rivalité qui n’est même pas à écrire.

D’un âge similaire à Seth Rollins, il a l’avantage de ne pas être endommagé par le booking que ce dernier a dû subir ces derniers mois. Pour terminer, même si les contrats offerts par la NJPW permettent de bien gagner sa vie, une offre de « top guy » à la WWE est impossible à contrer. Aux niveaux charisme, physique, âge et possibilités de marketing que ce soit au Canada, au États-Unis, ou encore au Japon, Kenny Omega est la pièce manquante pour amener la WWE vers la prochaine décennie.

Kenny Omega, le modèle du catcheur des années 2010
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