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Décryptage

Greatest Royal Rumble : Comment la WWE fait la danse du ventre en Arabie Saoudite

La WWE organise ce vendredi en Arabie Saoudite et diffusé dans le monde entier le show « Greatest Royal Rumble ». Un show qui n’est pas une simple soirée de catch ordinaire mais une grosse démonstration de force de l’entreprise de Vince McMahon devant les investisseurs locaux, au prix de quelques contraintes.

WWE

C’est un grand show que prépare la WWE pour ce vendredi 27 avril en Arabie Saoudite, un immense show pas loin de rattraper WrestleMania en terme de grandeur. Vous en doutez ? Allez voir les premières photos du décor qui se monte actuellement au King Abdullah Sports City de la ville de Jeddah à l’ouest du pays. La compagnie de Stamford est sur place depuis plusieurs jours déjà. Elle a même envoyé John Gaburick — un de ses anciens employés notamment passé par la TNA et Lucha Underground — qu’elle a réembauché récemment et qui s’occupera de la partie production du show.

Autre signe que le show est digne de la grandeur d’un WrestleMania : sa durée. The Greatest Royal Rumble durera pas moins de six heures — deux heures de kickoff et quatre heures pour le show principal. Six heures qui comporteront en grande partie évidemment le Royal Rumble de cinquante catcheurs, mais aussi huit autres matchs de championnat, un match entre John Cena et Triple H et un Casket Match entre Rusev et l’Undertaker.

Le simple fait que l’Arabie Saoudite ait le droit à un énorme show de catch n’est pas un problème en soi. On ne connait pas vraiment le potentiel de fans dans le pays mais la WWE y est déjà diffusée depuis plusieurs années via le bouquet OSN qui non seulement propose une version adaptée du WWE Network, la diffusion de RAW et SmackDown mais aussi un programme exclusivement réalisé pour le pays avec des interviews, des exclusivités des coulisses et quelques matchs diffusés pendant la semaine. Le Moyen-Orient est l’un des marchés croissants de la compagnie de Stamford, Il est normal qu’elle aille s’y produire comme elle l’a fait en Inde — avec le succès très mitigé que l’on connait, certes — et les fans sur place méritent tout autant de pouvoir assister en live à ce spectacle. Par ailleurs, le pays a signé un partenariat avec la WWE pour que cette dernière puisse venir s’y produire à nouveau et qui tient pour les dix prochaines années, rien que ça.

La « Women’s Revolution » oubliée le temps d’une soirée

Le problème c’est que pour se produire en Arabie Saoudite, il faut se plier aux lois locales qui sont encore pour le moins rétrogrades. Difficile par exemple de ne pas voir l’absence des femmes sur la carte de l’événement. L’Arabie Saoudite est un pays qui obéit au lois du Wahhabisme, un courant politico-religieux de l’islam sunnite qui entre autres instaure un apartheid sexuel. La femme y est toujours considérée comme inférieur et est placée sous la tutelle d’un homme qui est généralement le père, le frère ou le mari.

Mais 2018 est une année de changement pour l’Arabie Saoudite. Dans un plan qui n’est pas totalement désintéressé nommé « Vision 2030 » visant à faire en sorte que le pays se sorte de sa dépendance à l’économie du pétrole, L’Arabie Saoudite compte ouvrir certains droits aux femmes pour booster son économie. Les femmes vont par exemple pouvoir conduire afin d’accroitre l’économie du secteur automobile. Depuis peu aussi, les femmes sont autorisées dans le pays à pratiquer le théâtre en même temps et avec les hommes. Pour ce qui est du sport, de plus en plus de club féminins s’ouvrent et les dirigeants du pays encouragent de plus en plus de femmes à la pratique sportive. Il est ainsi logique que les femmes puisse désormais entrer dans des stades comme celui de Jeddah pour assister à des rencontres sportives, la WWE incluse.

Pour ce est qui de la raison de l’absence de catch féminin lors du Greatest Royal Rumble, il est possible que la WWE ait elle-même choisi de ne pas y envoyer de femmes. Il y a quelques mois aux Émirats Arabes Unis, Sasha Banks et Alexa Bliss étaient les premières catcheuses de la compagnie de Stamford à s’y produire, mais avaient dû porter des tenues spécifiques pour cacher une grande partie de leur corps. Les mêmes consignes sont obligatoires pour toutes femmes se montrant en public dans le pays. Ce fut par exemple le cas de la troupe canadienne du Cirque Eloize qui pour la première fois produisait un spectacle avec des femmes dans le pays.

Ce qui est aussi regrettable ici, c’est le silence de la WWE sur le sujet. Celle-ci organise le show sans femme en faisant comme si tout était normal, comme ci aujourd’hui cela n’avait rien de choquant. Aucune mention n’est faite nulle part de leur absence. En 2015 par exemple quand la compagnie de Stamford décide par exemple de ne pas envoyer Darren Young, ouvertement homosexuel, avec le reste du roster aux Emirat Arabe Unis où elle se produisait, celle-ci publie un communiqué après que le catcheur se soit plaint sur les réseaux sociaux de ne plus être soutenu par son employeur.

Malheureusement, la WWE ne peut changer les lois et cultures des pays du monde et c’est pour cette raison que nous n’avons pas envoyé Darren Young sur les prochains shows aux Emirats Arabes Unis, pour sa propre sécurité.

On peut regretter que pour le Greatest Royal Rumble la WWE, en tant qu’entreprise mondialement connue ne se soit pas servi de son influence pour faire passer de la même manière un message et s’exprimer ouvertement sur le sujet, profitant par ailleurs des quelques avancées vues dans le pays ces dernières années.

Une démonstration de force devant les investisseurs locaux

À Jeddah, la WWE est clairement dans une optique de démonstration. Il ne s’agit pas seulement d’y organiser un show. Elle envoie tout ce qu’elle a de mieux aujourd’hui pour montrer ce dont elle est capable. Évidemment vous vous en doutez, cette démonstration de force de l’entreprise des McMahon n’est pas désintéressée, elle espère s’installer dans la région durablement. Selon Ringside News, celle-ci espère y implanter dans un futur proche un centre de formation et compte bien faire les yeux doux devant les investisseurs locaux. Coïncidence ou pas, la compagnie Endeavor, propriétaire entre autres de l’UFC — concurrente économique de la WWE — s’est vu offrir 400 millions de dollars de la part d’investisseurs saoudiens en échange de 7% de ses parts le mois dernier.

Pour l’occasion la WWE sort donc le grand jeu : le show de ce vendredi prend évidemment une grande place, mais il y a les à-côtés. Notamment une séance de tryouts avec des talents locaux. Ici aussi que des hommes. Huit d’entre eux ont obtenu un contrat de développement et se rendront bientôt au Performance Center d’Orlando, et l’un d’entre eux participera même au Royal Rumble de ce vendredi. La méthode est quelque peu similaire à ce qu’avait fait la WWE en Chine il y a quelques années lors de son passage dans le pays qui avait vu la signature de Bin Wang que l’on retrouvait l’année suivante dans la bataille royal de WrestleMania.

La carte du show de vendredi a de quoi faire rougir celle de WrestleMania 34. Malgré l’absence de matchs féminins, toutes les ceintures masculines seront défendues. Le Greatest Royal Rumble semble même avoir le droit à des matchs plus intéressants que WrestleMania lui-même : Le titre Intercontinental aura le droit à un match à échelles entre Seth Rollins, The Miz, Finn Balor et Samoa Joe.

Brock Lesnar, qui aurait dû selon les informations du moment perdre son titre de champion Universal face à Roman Reigns le 7 avril dernier pour offrir un happy-end à WrestleMania 34, a vu son contrat prolongé de deux apparitions supplémentaire. Suffisamment pour qu’il puisse durer jusqu’à ce vendredi pour un match revanche qui aura en plus lieu en cage. Vince McMahon a-t-il sacrifié le main-event de WrestleMania 34 en faveur du Greatest Royal Rumble ? Cela ne fait aucun doute aujourd’hui.

Les titres de champions par équipe de RAW eux-aussi semblent avoir été totalement mis de côtés à WrestleMania avec un moment plus accès sur le divertissement et la comédie voyant Braun Strowman remporter les titres avec un jeune garçon choisi dans le public nommé Nicholas, tandis que pour le Greatest Royal Rumble un mini tournoi a eu lieu pour désigner de nouveaux champions. The Bar y affronteront ainsi Bray Wyatt et Matt Hardy.

L’Undertaker, figure importante de la WWE sera lui aussi de la partie pour un Casket Match contre Rusev. John Cena, que l’on a plus vu depuis sa défaite cinglante face au Deadman à WrestleMania fera son retour sur le ring pour affronter Triple H.

Attendez-vous ce vendredi à un grand show. On peut faire toutes les prévisions que l’on veut à propos du Greatest Royal Rumble, mais dans ce contexte de démonstration de force de la WWE, tout peut arriver et les surprises risquent d’être nombreuses ce vendredi soir.

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