Bullet Club 2023
Décryptage

BULLET CLUB : 10 ans après sa création, où en est le clan ?

Dix ans après sa création, le BULLET CLUB est toujours bien présent dans le monde du catch. État des lieux d’une faction définitivement entrée dans l’histoire de la discipline.

NJPW

Créé en mai 2013 par Prince Devitt (Finn Bálor), Bad Lucke Fale, Tama Tonga et Karl Anderson, le BULLET CLUB voit le jour au Japon, à la New Japan Pro-Wrestling (NJPW). Connu pour être l’une des factions les plus dominantes et les plus importantes dans le monde du catch au cours de ces dernières années, le BULLET CLUB s’étend rapidement pour s’implanter dans plusieurs fédérations indépendantes aux États-Unis ainsi qu’au Mexique. Quelques années après sa création, le clan domine notamment la Ring Of Honor (ROH), avant de franchir les portes, plus tard encore, d’Impact Wrestling.

Cependant, pendant 10 ans, le cœur du BULLET CLUB reste la NJPW, où de nouveaux catcheurs intègrent régulièrement le groupe tandis que d’autres le quittent pour des raisons diverses. En 2023, l’écho du BULLET CLUB au sein de la sphère du catch professionnel est colossal, et nul n’ignore l’existence et la nature du clan de « heels » fondé au Japon. Mais après plus d’une décennie d’existence, qu’en est-il concrètement du BULLET CLUB qui, aujourd’hui, semble peiner à retrouver le niveau d’impact et d’influence qu’il a pu avoir à ses débuts et lors de ses premières années de vie ? Pour pouvoir répondre à cette question, un retour sur les fondements du groupe et sur les grandes lignes de son évolution à travers le temps s’impose.

 

La création d’un clan révolutionnaire

Une trahison, un logo impactant, une « catchphrase » qui reste en tête, un leader charismatique, un excès d’arrogance, un soupçon d’irrespect et un zeste de tricherie indigne : voilà la recette originelle du BULLET CLUB, formé lors de NJPW Wrestling Dontaku 2013. D’abord dirigé par Prince Devitt, le clan s’agrandit rapidement et s’invite au Mexique, où il est représenté par plusieurs nouveaux membres au Consejo Mundial de Lucha Libre (CMLL) durant l’année de sa création. L’idée des membres fondateurs du BULLET CLUB est de prendre le contrôle du business, de s’imposer comme les prochaines superstars du ring et de dominer le paysage du catch professionnel, d’abord à la NJPW mais aussi en dehors des frontières japonaises par la suite. En octobre 2013, Matt et Nick Jackson, les Young Bucks, sont recrutés par Prince Devitt. L’impact du clan pour les deux catcheurs est immédiat : ils remportent la Super Jr. Tag League dans la foulée, puis deviennent champions par équipe Jr. Heavyweight de l’IWGP le 9 novembre à Power Struggle. À la fin de l’année, Doc Gallows rejoint à son tour la faction qui fait déjà l’objet d’une notoriété notable à la NJPW ; en effet, en plus des championnats par équipe Jr. Heavyweight de l’IWGP, le BULLET CLUB détient le championnat Jr. Heavyweight de l’IWGP grâce à son leader, Prince Devitt, resté champion sur l’ensemble de l’année 2013.

Bullet Club 2013.

Le BULLET CLUB en 2013. (NJPW)

L’année 2014 permet de constater que le BULLET CLUB joue un rôle majeur dans la mise en valeur des catcheurs qui font partie du clan. Entre Wrestle Kingdom 8 en janvier 2014 et juillet 2015, Karl Anderson et Doc Gallows remportent les championnats par équipe de l’IWGP à trois reprises. Les Young Bucks, eux, se révèlent au grand public en tant que membres du groupe. Ces derniers font partie des catcheurs qui exportent le clan aux États-Unis, à la ROH. Matt et Nick Jackson deviendront des figures emblématiques du BULLET CLUB entre 2013 et 2018, année de leur départ de la faction.

Alors que le départ de Prince Devitt de la NJPW en avril 2014 signe sa séparation avec le groupe qu’il co-fonda et dirigea pendant près d’un an — une séparation, qui plus est, facilitée par l’émergence de désaccords et de tensions entre Devitt et les Young Bucks —, le BULLET CLUB continue de construire et de renforcer sa notoriété en se basant, notamment, sur l’image d’un leader à la fois charismatique et performant dans le ring. Or, qui de mieux que « The Phenomenal One » AJ Styles pour succéder à Prince Devitt qui, lui, devient Finn Bálor en signant à la WWE en mai 2014. Le nouveau leadership d’AJ Styles est l’occasion pour le clan de s’élargir et d’accueillir son premier membre japonais, en la personne de Yujiro Takahashi. Le 3 mai 2014 à Wrestling Dontaku, 1 an après la création du groupe, le BULLET CLUB touche déjà le sommet de la NJPW, AJ Styles remportant le championnat poids lourds de l’IWGP en battant Kazuchika Okada.

En accaparant le championnat le plus prestigieux du catch au Japon, le groupe prend une nouvelle dimension et son influence dans le monde du catch n’est alors plus négligeable. La popularité de plusieurs membres et, surtout, d’AJ Styles, en particulier au Japon mais aussi aux États-Unis, permet à la faction de gagner grandement en importance. Le BULLET CLUB commence à compter également sur son internationalisation et sur son élargissement qui en découle, bien que la NJPW et la ROH restent les deux promotions qui voient le plus le groupe se développer. À ce stade, les fans du clan se permettent la comparaison avec le New World Order (nWo) des années 1990 ; il est en effet difficile de nier les ressemblances entre le nWo et le BULLET CLUB, tant dans l’attitude que dans l’identité visuelle.

Bullet Club 2014.

Le BULLET CLUB en 2014. (NJPW)

L’art de rester au sommet

Les premières années du BULLET CLUB voient le clan être magnifié par son identité forte, par la qualité des combats de ses membres et par l’intérêt suscité par les rivalités de ces derniers. Les catcheurs du groupe sont en effet souvent confrontés aux icônes de la NJPW, qui voient leur suprématie au sein de la promotion être alors questionnée : Kazuchika Okada, Hiroshi Tanahashi, Tetsuya Naito, Ryusuke Taguchi ou encore Kota Ibushi pour ne citer qu’eux. Mais à partir de 2016, ce sont également des tensions internes qui viennent susciter l’intérêt porté pour l’activité et l’évolution du groupe. En janvier, AJ Styles est éjecté du clan et directement trahi par Kenny Omega qui, alors qu’il faisait partie de la faction depuis novembre 2014, devient le nouveau leader du BULLET CLUB. Se renouveler et ne jamais se reposer sur ses acquis : telle est la solution pour ne pas devenir obsolète et pour conserver sa place au sommet de l’industrie du catch professionnel pour le clan. Comme pour Prince Devitt en 2014, le départ d’AJ Styles du groupe en 2016 intervient dans un contexte qui voit le catcheur signer à la WWE dans la foulée.

Entre 2016 et 2018, l’identité du BULLET CLUB est alors fortement marquée par la prise en main de The Elite, à savoir Kenny Omega et les Young Bucks. Avec sa victoire du tournoi de la G-1 Climax en 2016, son combat mémorable face à Kazuchika Okada à Wrestle Kingdom 11 puis sa victoire du championnat poids lourds de l’IWGP en juin 2018, Kenny Omega apparaît comme un leader qui maintient le BULLET CLUB sur le toit de l’industrie du catch, bien qu’il soit impliqué dans des conflits internes, notamment face à Tama Tonga qui, étant un membre fondateur originel, remet en question l’évolution et l’identité de la faction. En parallèle, le groupe gravite autour des sommets de la ROH : alors que Matt et Nick Jackson deviennent champions par équipe de la promotion plusieurs fois, Adam Cole est recruté et devient champion du monde de la ROH en tant que membre du BULLET CLUB. La période Elite du clan est également marquée par le passage de Cody Rhodes, qui s’impose, à cette période, comme l’un des catcheurs les plus importants du circuit indépendant après son départ de la WWE.

Kenny Omega, Tama Tonga, Cody Rhodes : une course au leadership du BULLET CLUB s’installe et se révèle paradoxale. En effet, alors qu’elle alimente les divisions internes dans le groupe, elle suscite, en parallèle, l’intérêt d’un public intrigué par l’évolution du clan. Le BULLET CLUB exprime alors son art de rester au sommet dans toute sa splendeur. Cependant, en 2018, le clan semble apparaître comme le résultat d’une addition de plusieurs individualités et non comme une faction unifiée et soudée.

Bullet Club 2017.

Le BULLET CLUB en 2017. (NJPW)

Octobre 2018 : un premier coup d’arrêt ?

L’écosystème du catch professionnel prend un nouveau tournant en 2018, avec une dynamique qui voit notamment le catch indépendant aux États-Unis prendre une nouvelle ampleur et revendiquer pleinement sa place. All In, qui eut lieu le 1er septembre 2018, est l’événement à la fois déclencheur et révélateur de cette impulsion. Or, les revendications de Tama Tonga quant au BULLET CLUB et la guerre civile qui en découle finissent par mettre un terme à l’aventure de Kenny Omega, des Young Bucks, de Cody Rhodes et autres Adam Page et Marty Scurll au sein de la faction.

En octobre 2018, le groupe perd donc certaines de ses stars, qui en ont fait le succès pendant plusieurs années. Au même moment, le BULLET CLUB trouve quand bien même les moyens de se renouveler, en recrutant Jay White qui, rapidement, s’impose comme la nouvelle figure référente du groupe au Japon. Mais en 2019, avec la naissance de l’AEW notamment, l’attention de l’univers catch semble se porter ailleurs. Le BULLET CLUB semble en effet commencer à trouver un écho moins influent au moment du départ de The Elite ; il reste cependant dynamisé par son homme fort Jay White qui devient champion poids lourds de l’IWGP en février 2019, faisant ainsi de lui le troisième leader de la faction à porter la ceinture autour des reins après AJ Styles et Kenny Omega.

Bullet Club 2022.

Le BULLET CLUB en 2022. (NJPW)

Le BULLET CLUB 2023 en recherche d’une nouvelle identité

La période marquée par la pandémie de Covid-19 n’arrange pas la situation pour le clan, qui s’invite à Impact Wrestling par le biais de Jay White et Chris Bey en 2021, puis Ace Austin en 2022. Alors que la ROH est rachetée par l’AEW, l’impact du groupe au sein de la promotion américaine créée en 2002 n’est plus perceptible. Jay White, en devenant champion du monde poids lourds de l’IWGP en juin 2022, continue de stimuler l’activité et l’influence du groupe jusqu’en 2023, alors que le BULLET CLUB vient de traverser une période trouble, caractérisée par un manque de clarté quant à son dessein et par le flou persistant quant à son leader : Jay White ? EVIL ? Tama Tonga ? Aujourd’hui, EVIL, qui a rejoint le clan en 2020, est le seul des trois hommes cités encore présent dans la faction, qui a récemment fêté ses 10 ans d’existence. Y a-t-il ainsi, depuis quelques années, une réelle perte d’intérêt pour l’évolution de la faction, ou bien le développement du clan est-il simplement freiné par un malheureux concours de circonstances ?

À lire aussi : Le main-event de NJPW Wrestle Kingdom 18 est connu

Le 6 mars 2023, David Finlay rejoint le BULLET CLUB et s’impose comme son nouveau dirigeant. Simplement, le catcheur est relativement moins connu à l’international que ses prédécesseurs, et le pari de le désigner leader semble ambitieux. Le BULLET CLUB se trouve alors, pour la première fois, à la recherche d’une nouvelle identité qui s’avère difficile à trouver et, surtout, d’une nouvelle place au sein d’un écosystème en mouvement et en évolution de plus en plus systématique. Alors qu’il semblait en bonne voie en remportant le championnat Never Openweight de l’IWGP en mai 2023, David Finlay a finalement été battu à NJPW Destruction in Ryogoku et a donc perdu sa ceinture face à Tama Tonga ; ne serait-ce pas une ironie du sort, qu’il perdit son titre face à l’ancien membre fondateur du BULLET CLUB, à qui il avait justement pris la ceinture ?

En octobre 2023, la faction continue à faire parler d’elle malgré le fait que son âge d’or semble être derrière elle. Elle compte de nombreux membres, qui catchent au Japon à l’image de David Finlay ou Taiji Ishimori, aux États-Unis à l’image de Chris Bey et Ace Austin, et au Royaume-Uni à l’image de Clark Connors et Drilla Moloney qui ont défendu les championnats par équipe Jr. Heavyweight de l’IWGP à Londres lors de NJPW Royal Quest III le 14 octobre dernier ; mais c’est bel et bien l’unité du clan qui semble être, en 2023, endommagée. Plusieurs sous-groupes font donc, tout de même, vivre le BULLET CLUB dans diverses promotions, à l’image du BULLET CLUB GOLD à l’AEW, composé de Jay White, Juice Robinson et les Gunns (Austin Gunn et Colten Gunn). Alors que les Gunns ont déjà été champions du monde par équipe de l’AEW, Jay White tentera, lui, de remporter le championnat du monde de l’AEW à Full Gear 2023 le 18 novembre prochain ; la réussite de ces catcheurs est un symbole de l’importance que le clan, dans son ensemble, réussit encore à conserver.

Le retour sur les gros événements de l’histoire du BULLET CLUB permet donc de comprendre une double dynamique qui se joue pour la faction : d’abord couronné de succès et au cœur de l’industrie du catch professionnel pendant plusieurs années, le groupe devient presque, dans un second temps, la première victime de son propre succès. Ainsi, alors que l’évolution du BULLET CLUB est, comme nous l’avons évoqué, grandement séquencée par les changements de leader du groupe, David Finlay sera-t-il capable de rédiger son propre chapitre et de faire perdurer la légende du clan dans les lignes de son histoire ?

BULLET CLUB : 10 ans après sa création, où en est le clan ?
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